Le fonds de prévoyance est une réserve que le conseil d’administration doit créer selon ses responsabilités dictées dans l’article 1071 et 1072 du Code Civil du Québec. Cette réserve servira aux réparations majeures et au remplacement des parties communes.
Dans un immeuble à copropriété divise, chaque copropriétaire détient une quote-part de l’édifice, c’est-à-dire un pourcentage des parties privatives et communes. Lorsqu’il y a un remplacement à faire, par exemple le remplacement des escaliers à l’entrée, c’est donc chaque copropriétaire qui doit contribuer au paiement de ces travaux. Pour éviter des factures trop salées lorsque le temps des travaux majeurs arrivera, un fonds de prévoyance doit être constitué et chaque année, le budget d’exploitation doit inclure une certaine cotisation à ce fonds.
La loi exige une cotisation annuelle d’au moins 5% du budget d’exploitation, quoique plusieurs experts proposent fortement un montant plus élevé. Que se passe-t-il lorsque des travaux majeurs sont nécessaires et qu’il n’y a pas assez de liquidités dans le fonds de prévoyance? Chaque copropriétaire sera obligé de verser une cotisation supplémentaire selon sa quote-part pour financer les travaux. Ce montant pourrait être assez important, surtout si les travaux sont d’une grande ampleur. Le fonds de prévoyance est donc obligatoire pour éviter ce genre de situation.
Dilemme pour le conseil d’administration
Fixer le montant des contributions au fonds de prévoyance peut s’avérer difficile pour un conseil d’administration représentant un syndicat en copropriété. Cette contribution va directement influencer le montant de charges communes (frais de condo) qu’un copropriétaire va devoir payer chaque mois. Les charges communes payables mensuellement sont déterminées selon cette formule :
(Frais mensuels pour administrer et maintenir l’immeuble + contribution mensuelle au fonds de prévoyance) X (quote-part du propriétaire en question) = charges communes requises
Lorsqu’un copropriétaire pense déménager dans un avenir rapproché, il sera réticent à ce que le conseil d’administration augmente les contributions au fonds de prévoyance. Ce copropriétaire a une réaction tout à fait logique car il doit payer des charges communes plus élevées mais il ne sera plus copropriétaire dans cet immeuble lorsque le temps de remplacer les aires communes arrivera. Cette opposition de certains copropriétaires doit être ignorée par le conseil d’administration, qui devra toujours avoir une vision à long terme de la planification financière.
Étude indépendante du fonds de prévoyance
Il est fortement conseillé d’établir un plan de contribution au fonds de prévoyance à l’aide d’un expert qui produira une étude indépendante. Un ingénieur par exemple, pourra étudier la structure de l’immeuble et déterminer le délai avant que certains espaces communs devraient être remplacés. Il pourrait faire les constats suivants :
- Nécéssité de remplacer la cage d’escaliers dans 10 ans
- Nécessité de changer les fenêtres extérieures dans 10 ans également
- Nécessité de refaire la toiture dans 20 années
Par la suite, un autre expert peut être consulté pour faire une estimation du coût de ces travaux. Il est certain que ceci est un travail d’approximation, et ceci démontre qu’établir un fonds de prévoyance adéquat est loin d’être une science précise. Qui sait comment le prix des rénovations va évoluer dans le futur, surtout sur un horizon de temps aussi long?
Le fonds de prévoyance est donc créé avec ces analyses et ces hypothèses. Par la suite, il suffit de faire quelques équations mathématiques afin de regarder combien les copropriétaires doivent cotiser maintenant afin de pouvoir payer pour ces travaux futurs.
Exemple des calculs possibles
Supposons que l’escalier principal à l’entrée sera à refaire dans 10 ans, et coûtera environ 8 000$. Plusieurs logiciels informatiques peuvent calculer le montant nécessaire des cotisations pour chacune des 10 prochaines années, mais ces calculs sont possibles aussi avec une calculatrice financière. Voici les variables à insérer :
N = 10 périodes car il y a 10 années à venir avant ce remplacement
I = 2% car supposons que le rendement du fonds de prévoyance est 2% par année
VF = la valeur finale doit atteindre 8 000$ car les travaux vont coûter ce montant
PV = la valeur présente est 0$ car supposons qu’il n’y a pas de somme accumulée dans ce fonds de prévoyance
Pmt = ?
La variable recherchée est le montant du paiement, et avec la calculatrice, il est possible de trouver la réponse 730,61$. Le syndicat de copropriété devra verser 730,61$ chaque année pour les 10 prochaines années, avec un rendement de 2% pour atteindre une somme totale accumulée de 8 000$. Ce 730,61$ sera divisé à travers les copropriétaires selon leur valeur relative de l’immeuble.
Ceci était seulement pour la rénovation des escaliers, mais plusieurs espaces communs seront appelés à être rénovés alors il faudrait refaire le même exercice pour chacun de ces espaces. C’est un travail très exigeant mais très bénéfique pour préserver une bonne santé financière de l’immeuble. De plus, en ayant un fonds de prévoyance bien garni, l’immeuble sera mieux vu par les acheteurs potentiels, ce qui en conséquence augmentera la valeur de chacune des unités.
Rendement possible
Dans l’exemple précédent, le rendement annuel du fonds de prévoyance a été fixé à 2%. Le conseil d’administration doit choisir des investissements qui sont facilement rachetables dans un délai de 30 jours. Un certificat de placement garanti gelé pour quelques années n’est donc pas une option possible. Généralement, un produit sans risque et rachetable rapidement offert par une institution financière est choisie pour y investir les sommes dans un fonds de prévoyance. Le rendement sur cet investissement n’est pas très élevé mais au moins le montant placé est garanti.
Distinction avec le fonds de sécurité
Plusieurs syndicats de copropriété incluent un fonds de sécurité dans leur budget, aussi appelé un fonds pour les imprévus. Ceci est un concept totalement différent du fonds de prévoyance. Le fonds de prévoyance doit être exclusivement utilisé pour financer les réparations et les remplacements des aires communes, alors que le fonds de sécurité est utilisé en cas de dépenses non-prévues dans le budget prévisionnel. Par exemple, il pourrait avoir une panne d’ascenceur et cela coûtera 1500$ pour faire les réparations. Cette dépense sortira du fonds de sécurité car elle fait parti du budget d’exploitation de l’année courante.
Au cours d’une année, si un syndicat de copropriété a plus de dépenses que de revenu, il sera déficitaire. S’il n’y a pas de gains accumulés des années précédentes, une cotisation extraordinaire doit être demandée aux copropriétaires afin d’équilibrer le budget. Ceci et la raison pour laquelle un fonds de sécurité est créé, pour avoir un certain coussin par rapport aux imprévus. Le fonds de prévoyance est un outil à plus long terme.